Gérer l’incertitude
Car il y a une triple incertitude à gérer :
L’évolution des comportements des clients et consommateurs tout d’abord.
Des lames de fonds vont se développer et bouleverser les comportements, les usages et les modes de consommation. A quelle vitesse ? Avec quelle ampleur ? Personne ne le sait aujourd’hui.
Deuxième incertitude, la capacité de recovery de l’économie après un tel recul.
A quoi va ressembler ce monde d’après ; Pas celui de Juillet, mais celui de décembre au moment des clôtures ou celui du premier semestre 2021.
Les crises précédentes peuvent-elles nous apprendre quelque chose ? Pas sûr, car il s’agit moins d’une crise financière qu’une crise systémique de la demande, une catastrophe qui a ébranlé des dynamiques entières de filières qui avaient fondées leurs développements sur des paris avec des risques connus et maîtrisables. La situation est aujourd’hui radicalement différente : crise de confiance et changement de paradigme.
Enfin, troisième incertitude, ce sont les critères d’analyse de la performance financière et économique.
Quel est le normatif demain ? Quelle sera la réaction des banques lors des futures négociations de waivers ? Comment analyser l’endettement massif des entreprises avec les très nombreux PGE ?
De nombreux critères vont évoluer, mais il faudra d’avoir des indicateurs, issus du passé, pour mettre à jours le “logiciel” d’évaluation de la performance des entreprises, puis adapter les stratégies ; stratégies elles-mêmes trop souvent guidées par le désir de se conformer à la tyrannie du normatif et des indicateurs.
Inventer de nouvelles stratégies
Pourtant, nous le savons, les résultats financiers sont la conséquence de la stratégie mais pas la stratégie. Or, une stratégie c’est un pari, un pari sur l’avenir et sur une intuition. Ce que nous apprend la crise du COVID-19, c’est qu’il va falloir faire des paris sans certitude.
Les datas ne font pas une stratégie et les experts non plus.
Le pragmatisme et l’intuition sont primordiales pour prendre les bonnes décisions. Colin Powell rappelle son approche : lorsque l’on possède entre 40 et 70 % de l’information, il faut prendre une décision.
Réinventer le conseil aussi
Pour accompagner les clients dans ce monde incertain, pour les remettre en selle, c’est une vraie révolution que le monde du conseil va devoir opérer, comme tous les secteurs et toutes les industries.
La première révolution est celle des idées.
Le standard permet juste de rester dans la course, rarement d’en prendre la tête ou de la gagner. Ce qui fait gagner, ce sont les idées nouvelles, l’intuition, la créativité et une prise de risque mesurée et quantifiée en modélisant les différents scénarii; les efforts à produire et l’investissement que l’on est prêt à perdre. “High risk, high rewards” dit le dicton. Créer de la valeur c’est avant tout penser ce qui va faire croître la top line. Le conseil va devoir combiner créativité, innovation et prise de risque.
La deuxième révolution est celle de l’hybridation
Cette crise va nous obliger à nous ouvrir à toutes les compétences, à tous les savoir faire, à toutes les approches en les combinant en dispositif pour travailler en mode sprint et excubation.
En mode sprint pour aller vite à un Proof of Value pour pouvoir le tester et l’améliorer.
En mode excubation pour extraire ces paris stratégiques des contraintes et contingences de l’entreprise, pour créer l’océan bleu qui jouera le rôle d’agent de transformation de manière beaucoup plus performante et rapide que l’intrapreneuriat, l’acquisition de nouveaux business ou de start-up.
La troisième révolution est celle de l’alignement d’intérêt.
Alignement d’intérêt de toutes les parties prenantes de la transformation internes (fonctions) ou externes (conseils ou partenaires technologiques) car à de rares exceptions, la divergence d’intérêt et les égos prennent le pas sur l’efficacité et in fine la transformation et sa promesse de performance en font les frais que ce soit en termes de création de valeur ou de vitesse d’exécution, quand ce ne sont pas des projets qui sont stoppés.
Alignement d’intérêt des conseils et de ses clients, en étant capable de proposer et de s’engager sur une performance, en ne se rémunérant plus seulement sur l’effort mais aussi l’effet. Cela implique d’être capable de prendre des risques et de co investir aux côtés des entreprises : il n’y aura jamais de meilleur gage de la pertinence des choix et des pivots que nous leur proposons de faire, parce que les conseillers seront aussi les payeurs.
Enfin, dernière révolution, celle du faire.
L’exécution est stratégique aujourd’hui, encore plus qu’hier.
L’incertitude à ceci de particulier c’est qu’on peut difficilement anticiper ou prévoir et le monde post COVID-19 nous y plonge brutalement.
Entre les intuitions, la décision et la mise en œuvre, le contexte aura pu changer et il faudra donc être agile et itératif entre stratégie et exécution. Les deux ne peuvent plus être gérées de manière séquentielle et en silo, le conseil en stratégie d’un côté et les conseils opérationnels de l’autre.
Ce sont ces défis que nous allons devoir affronter demain pour réinventer le conseil si nous voulons continuer d’être des partenaires de la performance des entreprises, des partenaires utiles.
Cyrille Breucq – CEO & Partner @ The Why Factor Company
Lionel Cuny – CEO @ Insign & Partner @ The Why Factor Company